La notion d’arbitrage et son exécution

Introduction

L’arbitrage se définit comme une justice privée chargée de trancher les litiges qui lui sont soumis par les parties dans le respect des principes du droit.

Pour avoir recours à l’arbitrage, les parties au litige doivent être d’accord sur ce mode de règlement du conflit.

I – La sentence arbitrale

La sentence arbitrale est la décision rendue par un tribunal arbitral, ou un arbitre statuant à juge unique concernant le litige qui lui est soumis.

Les sentences arbitrales sont régies par les articles 1469 à 1480 du Code de procédure civile.

En ce sens, l’arbitre rend une sentence qui possède entre les parties l’autorité de la chose jugée, c’est à dire qu’une fois la sentence prononcée, les parties ne peuvent pas saisir à nouveau un arbitre pour obtenir une solution différente sur la même affaire.

Toutefois, cette sentence n’acquiert force obligatoire que par l’intervention d’un juge, qui délivre une ordonnance d’exequatur.

Les parties peuvent avoir convenu que la sentence arbitrale sera susceptible d’appel devant la Cour d’appel, puis d’un recours en cassation devant la Cour de cassation. Toutefois, si les parties n’ont pas convenu d’une possibilité d’appel, la sentence arbitrale peut faire l’objet d’un recours en annulation devant une juridiction étatique.

II – La clause compromissoire

Dans les contrats internationaux, une clause compromissoire est fréquemment stipulée par les parties.

En effet, la clause compromissoire intervient comme un mode privé de solution des conflits.

L’article 1442 du Code de procédure civile précise qu’elle permet aux parties de s’engager à soumettre à un arbitre tout litige qui pourrait naître pendant leur contrat[1]. En ce sens, cette clause se réfère à un contentieux éventuel et futur.

Toutefois, pour que l’arbitrage soit possible et que cette clause compromissoire soit valable, il faut que celle-ci intervienne dans les contrats conclus à raison d’une activité professionnelle, comme le précise l’article 2061 du Code civil[2].

Pour qu’elle soit valable, la clause compromissoire doit être stipulée par écrit et doit désigner les arbitres ou les modalités de leur désignation. 

La clause compromissoire possède une certaine autonomie par rapport à la loi étatique, c’est à dire que cette clause compromissoire s’apprécie en considération d’une règle matérielle française directement applicable dès lors que les juridictions françaises sont saisies. Cette notion a été consacrée par l’arrêt Dalico du 20 décembre 1993[3].

De ce fait, l’autonomie de la clause compromissoire signifie que celle-ci est indépendante du contrat dans lequel elle se trouve.

En ce sens, la nullité, la résolution ou la résiliation du contrat principal n’ont aucune incidence sur l’existence et la validité de la clause compromissoire.

III – L’ordre public international

1 – La notion d’ordre public international :

L’ordre public international est un ensemble de règles et principes applicables soit au fond du litige, soit à la procédure arbitrale, qui doivent être respectés dans l’ordre juridique de l’Etat.

La Cour de cassation dans son arrêt Lautour du 25 mai 1948 définit l’ordre public international comme l’ensemble des « principes de justice universelle considérés dans l’opinion française comme doués de valeur internationale absolue »[4].

2 – L’ordre public international procédural :

L’ordre public procédural est une composante de l’ordre public international intégrant les principes fondamentaux de procédure, notamment les principes consacrés par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

En effet, il serait impossible d’admettre qu’une décision de justice n’ayant pas respecté ces principes fondamentaux puisse produire effet dans notre ordre juridique.

IV – L’exequatur

L’exequatur est une procédure par laquelle le bénéficiaire d’un jugement étranger entend lui voir conférer force exécutoire sur le territoire français puisque toute décision de justice ou sentence arbitrale rendue à l’étranger ne s’applique pas automatiquement sur le territoire français.

De plus, l’article 509 du Code de procédure civile[5] précise que les jugements étrangers deviennent exécutoires sur le territoire français « de la manière et dans les cas prévus par la loi ».

1 – Les conditions de l’exequatur :

La Cour de cassation, notamment par l’arrêt Cornelissen du 20 février 2007, a défini trois critères d’obtention de l’exequatur[6] :

– la compétence du juge étranger ayant rendu la décision faisant l’objet de la demande d’exequatur ;

– la conformité de cette dernière à l’ordre public international ;

– l’absence de fraude à la loi.

Ces trois conditions sont cumulatives, ce qui signifie que l’exequatur peut être refusé dès lors qu’une seule condition fait défaut.

Le juge français saisi d’une demande d’exequatur doit d’abord s’assurer que le juge étranger qui a rendu la décision concernée était bien compétent pour statuer.

Pour ce faire, il doit utiliser trois critères dégagés par la jurisprudence[7] :

  •  s’assurer que le juge français ne disposait pas lui-même d’une compétence exclusive pour trancher le litige ayant donné lieu au jugement faisant l’objet de la demande d’exequatur ;
  •  vérifier que le litige se rattache d’une façon ou d’une autre au pays dans lequel le juge étranger a été saisi ;
  • constater l’absence de fraude du demandeur ayant saisi la juridiction étrangère pour obtenir une décision.

Ensuite, le juge français saisi de la demande d’exequatur doit vérifier la conformité de la décision à l’ordre public international.

Puis, ce dernier doit vérifier que le demandeur n’ait pas sollicité le juge français à la suite d’une procédure viciée par une intention frauduleuse.

Le juge de l’exequatur doit également contrôler la régularité de la procédure suivie par le juge étranger. En effet, la jurisprudence a admis certains critères constituant l’ordre public procédural :

  • le principe de motivation du jugement
  • le droit d’accès au juge
  • le respect des droits de la défense

C’est à l’occasion de la mise en œuvre de la procédure d’exequatur que devra être considérée la régularité de l’ordre public international français.

C’est pourquoi cette variabilité dans le temps de la conception française de l’ordre public international peut engendrer de nombreuses incertitudes.

Si une règle contraire à l’ordre public international français est appliquée dans une décision étrangère, alors l’exequatur est arrêté.

La motivation des décisions de justice est considérée comme une exigence de l’ordre public international de procédure par le droit français.

Les décisions qui pourront faire l’objet d’une procédure exequatur sont les suivantes :

  • Les jugements prononçant un divorce,
  • Les jugements prononçant une adoption,
  • Les jugements condamnant une partie à payer une somme d’argent,
  • Le volet civil d’une décision pénale,
  • Les sentences arbitrales.

Le tribunal judiciaire est compétent pour recevoir des demandes d’exequatur.

Les dispositions applicables sont les règles édictées par le Code de procédure civile et la jurisprudence mais également les conventions bilatérales entre la France et le pays d’où la décision émane.

2 – Les effets de l’exequatur :

L’exequatur a pour principal effet de rendre exécutoire, sur le territoire français, la décision rendue par un juge étranger.

La décision prononçant l’exequatur ne peut avoir qu’un caractère déclaratif. En effet, le juge ne fait que reconnaître la force exécutoire d’un jugement rendu par un juge étrange et n’a aucun pouvoir de révision du fond de la décision[8].


[1] Article 1442 du Code de procédure civile : “La convention d’arbitrage prend la forme d’une clause compromissoire ou d’un compromis.

La clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un ou plusieurs contrats s’engagent à soumettre à l’arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce ou à ces contrats.

Le compromis est la convention par laquelle les parties à un litige né soumettent celui-ci à l’arbitrage.”

[2] Article 2061 du Code civil : “La clause compromissoire doit avoir été acceptée par la partie à laquelle on l’oppose, à moins que celle-ci n’ait succédé aux droits et obligations de la partie qui l’a initialement acceptée.

Lorsque l’une des parties n’a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle, la clause ne peut lui être opposée.”

[3] Cass., 1ère Civ., 20 dec. 1993

[4] Cass., 1re Civ., 25 mai 1948, Lautour, n°37.414

[5] Article 509 du Code de procédure civile : “Les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République de la manière et dans les cas prévus par la loi.”

[6] Civ 1ère, 20 févr. 2007, n° 05-14.082 ; Civ. 1ère, 29 janv. 2014, n° 12-28.953 ; Civ. 1ère, 17 déc. 2014, n° 13-21.365

[7] Civ. 1ère, 6 févr. 1985, n° 83-11.241

[8] Civ. 1ère, 7 janv. 1964, n° 62-12.438 et  Civ. 1re, 22 juin 2016, n° 15-18.742